mercredi 3 octobre 2012

Theriaca, Teriaca, Thériaque...


Aujourd’hui, je commence une série de post un peu plus historique que celui d’hier, et oui, il faut bien que je vous parle un peu de mon travail quand même !

J’ai avant tout choisi la destination de Venise pour mes recherches car elle reste la principale plaque tournante du commerce, avec l’Orient notamment, d’où provenaient un nombre incalculables de matières premières pour la fabrication des médicaments, remèdes, parfums et cosmétiques.

D’un autre côté, Venise était également un grand centre d’impression. La production des livres de médecine et de pharmacie était abondante et puisait ses sources dans les traités des auteurs antiques comme Avicenne (j’en reparlerai). Les pharmaciens reproduisaient alors les recettes trouvées dans ces écrits.

Ce prestigieux métier était donc soumis à des lois rigoureuses, garantes de la qualité de la production et permettant ainsi l’exportation. Quatre-vingt-dix pharmacies possédaient donc le droit de fabriquer et de vendre leurs produits. L’importance de ce commerce fut tel qu’à partir de 1616, les pharmacies ne devaient être à moins de trente-cinq mètres minimum de distance.

C’est en feuilletant un guide de Venise que je suis tombée, de nouveau, sur un article de qualité sur la theriaca. J’avais déjà étudié ce produit l’année dernière pour mon master 1 et je souhaitais inaugurer cette nouvelle série de post par ce remède.



Alors, qu’est-ce que la Theriaca ?


Un peu d’histoire...



La première mention de ce nom remonte à l’Antiquité, au IIe siècle
avant J.-C.. Nicandre, médecin-poète de Colophon (Ionie), écrit une oeuvre intitulée  Ta Theriaca qui porte sur les morsures des animaux venimeux et les remèdes à utiliser. Douze espèces de serpents sont mentionnées. Il faut savoir, que la racine de ce mot, therion, signifie vipère en grec ancien et plus largement, poison.
La première theriaca fut concoctée par Mithridate, roi du Pont (Turquie) en 65 avant J.-C. qui craignait l’empoisonnement. Andromaque, médecin de Néron, la compléta en ajoutant aux quarante-six ingrédients d’origine, vingt-cinq autres. C’est toutefois le médecin de Trajan, Criton, qui lui donna son nom de Theriaca, et Galien (j’en reparlerai également), lui donna sa réputation.
Par la suite, Venise devint célèbre pour sa Theriaca dès la fin du XVe siècle. Cependant, toutes les pharmacies n’avaient pas le droit de la préparer, seules celles avec l’appellation teriacanti y étaient autorisées. La préparation devait être réalisée en public et les ingrédients présentés pendant trois jours devant la pharmacie.



La composition

Selon la recette de Galien, la scille (une plante herbacée), la vipère (chair desséchée) et le pavot étaient les principaux ingrédients. Forcément, ce dernier participait activement à la réputation apaisante et calmante du remède.
On trouve également d’autres herbes broyées aux diverses propriétés comme la lavande, la menthe, la myrrhe, l’encens, le castoreum, la cannelle, le poivre, le gingembre... Le tout était mélangé à du miel, sirop, vin, pour former une sorte de pâte que le malade devait avaler.
La Theriaca possède plusieurs recettes car ce remède fut célèbre dans diverses parties de l’Europe. En France, où la Thériaque connaît son apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles, la célèbre école de médecine de Montpellier fabriqua la sienne, tout comme Strasbourg, Paris, Lyon, Nantes, Toulouse...





Les bénéfices ?

Bon d’accord, ce n’est pas à proprement parler un produit de beauté mais plutôt un médicament... C’était un remède contre toutes les petites maladies sympathiques qui pouvaient traîner dans les rues à cette époque : peste et maladies contagieuses, la tuberculose, les fièvres putrides, les maux d’estomac, les problèmes de vue, les piqûres de scorpion, de vipères, les morsures de chien. Autant dire, la potion magique !




A Venise, il reste encore certaines traces de la fabrication de la Theriaca comme sur le Campo de Santo Stefano, devant le numéro 2800, où des renfoncements dans la pierre marquent l’emplacement des chaudrons dans lesquels le remède était préparé. Egalement, dans le pavé à San Canciano, devant la pharmacie Alle due colonne.

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